Adieu Madonna

8 mars 2007, journée internationale des femmes.

Une belle occasion pour faire le point sur des idées et questions qui m’habitent depuis quelque temps : l’image des femmes en 2007, les choix qui s’offrent à moi, et le futur des prochaines générations de femmes.

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Nous avons pour la pluspart de plus en plus de choix qui s’offrent à nous. En tant que jeune Québécoise, j’ai eu toutes les portes ouvertes : j’ai eu le choix entre des miliers d’emplois, j’ai eu le droit de vote, j’ai pu choisir d’avoir une carrière ou de rester à la maison, j’ai pu même voyager seule à travers le monde, et décider d’aller m’installer où bon me semblait.

Nous sommes passées en quelques années de maîtresses de maison à artistes, femmes d’affaires et chef d’entreprise. Le destin de mes grand-mères était clair : occupées à temps plein à prendre soins de la maison et de la famille, comment auraient-elles pu avant aujourd’hui être des artistes, philosophes, médecins, chercheurs, scientifiques, dentistes, voyageurs, pilotes, ou entrepreneur? La pluparts de ces titres n’ont même pas d’équivalent féminins (à part le terme “danceuse” qui est utilisé fréquamment).

Pour une des première fois dans l’histoire, la femme peut maintenant exploiter pleinement son potentiel créatif autrement que par le tricot. De nouveaux pouvoirs nous ont été accordés, nous rendant plus maîtres de notre destin, nous offrant plus de choix, et de liberté.

En 2007, les femmes que je connais continuent de s’investir dans le bien-être des femmes, pour elles-mêmes, et pour les générations futures. √ätre bien dans sa tête, et dans sa peau, est maintenant le défi de plusieurs. Nous croyions avoir acquis une nouvelle liberté, mais dans le fond si on fouille un peu, on se retrouve encore victime, victime de gens qui nous dictent quelle devrait être l’apparence d’une femme à la hauteur en 2007. Nous nous pensions libres et émancipées, mais en fait nous sommes toutes très vulnérables à la fausse image de femme communiquée par les médias. Quelqu’un sans visage, qu’on ne peut pointer directement, contrôle notre bien-être, mental et physique.

Parlons-en un peu. Si demain je veux être conforme à l’image féminine qui circule dans les médias, je dois être grande, svelte, d’allure jeune, avoir une belle peau que je maquillerai, avoir les ongles faits, être haute sur mes talons, dans un tailleur bien ajusté. Et je suis supposée me sentir bien, du moins, en avoir l’air.

Hors, nous ne sommes pas toutes grandes, et sveltes. Le corps humain est différent d’un individu à l’autre et on ne peut forcer la nature. Les cosmétiques qu’on voudrait que j’utilise sont composés d’éléments chimiques, tous absorbés par mon corps, mais personne n’en parle, tous veulent que je me décore et vide mon portefeuille. Sans parler des talons haut, belle invention de l’homme, qui à coup sûr me brisera le dos, mais ça aussi, je ne le verrai qu’à mes 70 ans.

Comment suis-je supposée, dans un tailleur ajusté, en talon, maquillée et manucurée, me sentir libre? Tous ces éléments sont là et m’empêchent de me sentir libre, de partir à courir si j’en ai envie, lever les bras pour crier hourra!, d’embrasser quelqu’un sur la joue, et même juste me gratter un oeil si ça me dit (essayer ça avec du mascara pour voir…).

Tout ce cirque ne rime qu’à une chose, brimer ma liberté, à mon issue. Me laisser croire que j’ai besoin de toutes ces choses pour être reconnue est une insulte à mon intelligence. Mais encore ici, il n’y a personne que je pourrais pointer. Une conspiration silencieuse et invisible.

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J’ai grandi avec la télé. J’ai passé des heures à scruter les stars de la pop durant toute mon adolescence, et encore, ce phénomène me fascine.

J’ai tellement eu d’admiration, et d’envie “d’être comme”, pour les stars féminines qui ont ouvert le chemin, et qui malgré les critiques ont débroussaillé et fait le ménage dans les idées préconçues.

Hors, malgré tout le respect et l’admiration que j’ai pour une artiste comme Madonna, malgré tout ses efforts et son courage pour faire disparaître les tabous, je crois être mûre pour un adieu. D’un extrême nous sommes passées à un autre, et ici encore, les “standards à respecter” sont très haut, fixés par une femme presque machine. On ne peut pas tous faire du yoga chaque matin, courir son kilomètre par jour, se faire embaumer dans le butox pour rester d’allure jeune, travailler 80 heures par semaine, avoir une carrière brûlante, une famille et parcourir le monde.

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Je crois que le défi de la femme est maintenant plus que jamais de s’accepter comme elle est. S’aimer et s’accepter malgré toutes les images qui nous bombardent chaque jour. √ätre un work-in-progress, et jouer – être libre de choisir ce qui est bien pour nous, pour notre bien-être mental et physique.

Peut-être nous faudra-t-il faire nos adieux à Madonna.

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Hommage aux blogueures et créatrices inspirantes :

martine, meb, clairebu, vérob, keri smith, guylaine, Luce, MJ, artemesia, sophie, josée, nouknouk – je suis certaine que j’en oublie, aidez-moi à continuer la liste!

3 comments

  1. Super woman, on essaie peut-être toutes de l’être, jusqu’au moment où la vie se charge de nous rappeller que les super héros n’existent pas, que la vraie vie se vit dans les petites choses, celles dont on ne parle pas à la une mais qui font vraiment toute la différence. J’ai deux adolescentes et c’est par et pour elles que je fais une différence, au quotidien. Que je suis moi-même, ni plus ni moins, afin de leur montrer que les femmes authentiques sont aussi (plus même!) heureuses que les Madonna et autres starlettes…

  2. Wow! Quel article! Je te verrais bien faire une conférence pour les jeunes adolescentes au cerveau lessivé de mon école…

    Sans plaisanter, je pense que beaucoup de femmes méritent des hommages pour simplement demeurer fidèles à elles-mêmes.

    Et Martine a raison, il manque toi au top de la liste 🙂

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