La grêve étudiante, une crise générationnelle?

Le présent mouvement social, à l’ère du web 2.0, amène les Québécois à se prononcer haut et fort. Les gens brandissent leurs casseroles dans la rue, et sur le web, où tous peuvent être entendus.

Depuis quelques semaines, Facebook et Twitter sont devenus une arène, un place publique où je discute avec amis et famille, gens de 33 à 65 ans, et où j’ai terminé ma journée d’hier en engueulade avec mes tantes. J’était loin de m’imaginer qu’un jour, ce type de scénarios se présenterait.

Sur le web, je suis confronté à des idéologies que certains qualifient d’exaspérantes. Certaines sont exprimées de manière franches et directes, et d’autres ressemblent à des copiers-coller de ce que les outils de propagande ont publiés hier. Je me sent prise entre des gens cultivés, posés et réfléchis, et des réactionnaires qui chialent contre les manifestants qui briment leur version de la démocratie. On les dérange parce qu’on veut changer le monde.

De fil en aiguille, j’ai compris que pour certains babyboomers, et leurs enfants qui adoptent sans questionner le raisonnement de leurs parents, la démocratie a comme base le modèle judéo-chrétien dans lequel ils ont grandit : il faut à tout prix se soumettre et obéir à l’autorité. Se mettre à genoux quand on nous le demande.

De là je peux comprendre toute l’indignation de mes tantes face à cette génération qui refuse la soumission, qui refuse de retourner sur les bancs d’école comme pôpa Jean Charest l’a ordonné.

De résister à l’autorité, ça ne se fait pas, et c’est sur cela que je me fais sermonner malgré mes arguments. Plusieurs ne comprennent pas que le fossé qui les sépares des jeunes manifestants est immense. À leurs yeux, les manifestants sont individualistes, égoïstes, et veulent tout cru dans le becs. À mes yeux, c’est eux qui sont individualistes et égoïstes.

Quand je lis leurs arguments, je me demande si on est rendu au point où cet écart générationel et culturel est tellement grand que les babyboomers devraient peut-être être impliqués dans le processus décisionnel du Québec de manière proportionnelle à la démographie des 18-24 ans du Québec.

Je m’inquiète des décisions du citoyen dont les valeures sont celles de citoyens soumis. Ces derniers, une masse passive, sont des pions de luxe pour le gouvernement : ils consomment beaucoup, paient leurs impôts, ont peu ou pas de conscience environnementale, et sont trop fatigués par leurs 40 heures de travail pour se battre contre quoi que ce soit. Un peuple facilement manipulable dont les racines sont celles de gens colonisés, qui sont (sans en être conscient) heureux, voir même reconnaissants, qu’on leur laisse le droit d’exister. Ils ont travaillé dûr toute leur vie pour un bonheur différé, le moment dont ils rêvaient, leur retraite. Et les étudiants les dérangent.

Mes tantes argumentent que les jeunes eux ont tout eu cru dans le bec, les traitants de voyous, d’enfants gâtés avec leurs iphones, ipad, etc. Cet argument met la lumière sur un coté sombre de la société québécoise : “tes grands-parents, arrières grands-parents et moi même ne l’avons pas eu facile, alors pourquoi aurais tu droit toi, jeune génération de l’ère moderne, à mieux que nous?”

Ces gens critiquent des jeunes qui sont de toute évidence plus intelligents et honnêtes que leur gouvernement. Ils les traitent d’égoïstes, d’individualistes, fesant rater une session à ceux qui veulent retourner sur les bancs, en oubliant que le vote de la grève est lui un procédé démocratique.

Hors, ces jeunes offrent des propositions et un projet social à long terme. Ils sont là debout depuis trois mois, réfléchissent et travaillent sur des propositions. Ils offrent au Québécois la chance de réduire la corruption et de reprendre en mains une partie du système, soit l’éducation. Cela n’est en rien individualiste. Ceux qui se positionnent contre les manifestants sont souvent les gens à pointer comme citoyens-roi et individualistes, sans vision et fatalistes.

Certains invoquent une éventuelle faillite du Québec, ce qui n’arrivera jamais si les ressources sont justement réparties. Ils disent qu’on doit attendre les élections, et on verra qui est le plus fort. Un raisonnement de cromagnon. “Assis-toi, et attend ton tour”. Hors, ce tour n’arrivera jamais car nos gouvernements abusent toujours du pouvoir qu’on leur offre. Le système démocratique actuel me semble désuet face au manque de confiance qu’on les jeunes envers ces mêmes gouvernements qui soutiennent les banques.

Bref, ceci n’est plus une grève.

Les Québécois ont rejoint un mouvement international qui vise à éveiller la responsabilité citoyenne pour éliminer la corruption et de l’abus du pouvoir sous toute ses formes.

Pour le Québec et les générations à venir, se présente aujourd’hui une occasion de débuter la refonte d’un système désuet pour passer dans une ère nouvelle.

Choisir de bâtir notre maison avec des matériaux de qualité au lieu d’utiliser du bois pourris.

Être un exemple, et non un mouton, aux yeux du reste de l’Amérique.